lundi 23 juillet 2012

Le deuil

    Nous avons tous été ou nous serons
    tous confrontés au deuil. C'est une loi
    de la nature...
 
      J'essaye de me faire à cette idée
    alors qu'on recouvre le cercueil de mon
    grand père d'une poignée de terre.
 
      Quand un proche meurt, on dit qu'il
    nous quitte. Le prêtre, dans son
    discours, ne cesse de souligner la
    douleur de "ceux qui restent". Pour
    lui, il ne fait aucun doute que mon
    grand-père sera plus heureux là où il
    va.
 
      "Il part et nous restons" dit-il.
     
      Cette idée me donne la chair de
    poule. Elle est injuste. Elle implique
    que la mort est un bienfait tandis que
    la vie ne vaut pas la peine d'être
    vécue. Je pense le contraire : nos
    chers défunts n'ont plus rien à perdre,
    mais nous, nous avons encore tant à
    vivre !
 
      Ils restent. C'est nous qui partons.
     
      Une pluie fine s'est mise à tomber
    sur le cercueil maintenant couvert au
    trois quart de terre.
 
      J'imagine la vie comme un vaste hall
    de gare. Les défunts attendent au bord
    de la voie. Ils sont là, un peu
    désemparés, comme l'ami qui vous
    accompagne. Le train s'éloigne. On
    agite la main par la portière et celui
    qui vous répond depuis le quai
    s'amenuise dans la distance.
 
      Ils restent, nous partons.
     
      Le phénomène de l'éloignement
    physique n'explique pas tout. Ils
    rapetissent parce qu'ils restent. Rivés
    sur le quai de la gare, ils deviennent
    des lilliputiens. Ils se fondent dans
    le lointain d'une vie immuable : mêmes
    repas autour de la même table, mêmes
    feuilletons télé, et le chien,
    semblable à lui-même, et le paysage,
    figé pour l'éternité dans l'encadrement
    de la fenêtre du salon. Nous, les
    voyageurs en route pour une nouvelle
    vie, nous faisons figures de géants.
    Nous sommes les aventuriers. La vie
    nous réserve encore de belles surprises.
 
      Aujourd'hui, mon grand père est
    arrivé à destination. Il a posé ses
    bagages. Il reste.
 
      Moi, je continue le voyage.
   
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      "Vivre ce n'est pas seulement
    changer, c'est continuer."
      Pierre Leroux
     
      "Ceux qui rient et qui jouent sont
    les plus vivants"
      Plotin
     
     
    (c)2007, www.cpositif.com

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